Je n’ai pas le temps…

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Le gagnant est… « Je n’ai pas le temps… ». Eh oui, cette expression arriverait sans doute en tête des expressions dans l’entreprise. Le temps est devenu aujourd’hui une denrée rare. Une ressource qui prend chaque année de la valeur du fait de sa rareté. Tout le monde est en quête de temps. La fonction Qualité n’est pas épargnée, bien au contraire. Elle croule sous les activités opérationnelles, elle réalise de plus en plus de reporting, elle est conviée à de nombreuses réunions, elle gère de nombreux projets,… Aujourd’hui la performance d’un collaborateur ne peut se résumer uniquement à son temps de présence dans l’organisation. On ne peut plus aujourd’hui raisonner de cette manière.

J’ai connu l’époque où commencer très tôt le matin et finir très tard le soir était un signe de responsabilité au regard des autres. J’ai connu l’époque où prendre des « devoirs » le soir était synonyme d’engagement professionnel et de sérieux. Bien entendu, il peut exister des périodes exceptionnelles à plus forte activité qui nécessitent un plus fort engagement. Le travail avec des responsabilités est rarement linéaire. Le danger survient quand l’exceptionnel devient la règle. La fatigue se fait sentir. On devient de moins en moins productif et de ce fait on est obligé de travailler encore plus pour réaliser la même charge de travail. On prend du retard. On est très facilement irritable. Inconsciemment, on peut très bien brasser des données inutiles pour se rendre utile et se sentir submergé de travail alors que la réelle valeur ajoutée de toute cette agitation est minime.

Dans leur ouvrage Re-Work, Jason Fried et David HeinemeierHansson vont encore plus loin dans leur réflexion en précisant que « cette attitude est seulement inutile mais idiote. Travailler plus ne signifie pas être plus dévoué ou plus productif. Travailler plus veut seulement dire… travailler plus. Les bourreaux de travail tentent de résoudre les problèmes en multipliant les heures qu’ils y consacrent. Ils essaient de compenser la paresse intellectuelle par la force brute ce qui donne des solutions inélégantes. Ils ne cherchent pas à devenir plus efficaces parce qu’en réalité ils aiment faire des heures supplémentaires. Ils aiment se prendre pour des héros. Ils créent des problèmes (souvent involontairement) pour pouvoir continuer à se défoncer ». Le Manager Qualité 2.0 doit ainsi avoir une relation moderne avec le temps. Il ne peut pas se contenter de mesurer la performance de son activité au nombre d’heures réalisées. Le temps est une ressource et comme toute ressource c’est un moyen et non une finalité. La performance sur les résultats d’un dossier n’est pas systématiquement proportionnelle au temps consacré. Bien au contraire. Trop de temps peut laisser place à du vide et l’on va chercher à combler le vide par du « détail ».

Soyez honnête : vous arrive-t-il souvent de ne pas utiliser tout le délai dont vous disposez pour un travail ? Cette « loi » a été énoncée en 1958 par le professeur C. NorthcoteParkinson littéralement sous la forme suivante : « Workexpands to fill the time available for itscompletion« (« Le travail s’étend de telle sorte qu’il occupe in fine le temps mis à disposition pour sa réalisation »).Cela signifie que, si un manager a dix personnes sous la main pour exécuter une tâche dont pourraient s’acquitter cinq personnes en une semaine, vous pensez, arithmétiquement, qu’il en aura fini au bout de deux jours et demi. Eh bien, non. Il rajoutera ce qu’il faut de complications, réunions, consultations,… pour que le chantier dure effectivement une semaine à dix personnes. Nous avons tous tendance à respecter ce principe « une tâche nécessite tout le temps dont on dispose pour l’effectuer ». Autrement dit, une tâche grossira en importance et complexité (perçue) à la mesure du temps alloué à sa réalisation. C’est la magie des dates butoirs imminentes. Si je vous donne 24 heures pour achever un projet, cette pression de temps vous oblige à vous concentrer sur l’exécution et vous n’avez d’autres choix que de faire l’essentiel et rien que l’essentiel. Bien entendu, cette loi doit être consommée avec modération. Il ne faut pas non plus tomber à l’extrême car sinon tout devient vitesse, exécution, réalisation,… un comportement qui se caractérise souvent par un manque de profondeur. La rapidité est souvent synonyme d’approche superficielle.

Ainsi, le Manager Qualité 2.0 doit travailler mieux sans pour autant travailler plus. Il doit être performant et non plus simplement efficace. La différence est subtile entre ces deux approches. Être efficace, c’est faire des choses qui vous rapprochent de vos objectifs. Être performant, c’est accomplir une tâche donnée (qu’elle soit importante ou non) de la manière la plus économique possible. On verra tout au long de cet ouvrage la déclinaison du « travailler mieux » par des exemples concrets. Le Manager Qualité 2.0 doit ainsi réorganiser son temps de travail pour sortir de ses rituels opérationnels et s’accorder du temps « pour le mieux » au détriment du « plus ». Travailler mieux c’est la capacité de gérer ses dossiers sans stress négatif et ceci dans les délais impartis. Travailler mieux c’est la capacité à être en situation de vigie par rapport à son domaine d’activité (écoute active du marché). Travailler mieux c’est la capacité à se former tout au long de la vie pour éviter l’obsolescence de ses connaissances. Travailler mieux c’est la capacité à gérer des projets qui préparent l’avenir. Travailler mieux c’est assurer une délégation de confiance avec les parties prenantes. Autant d’éléments qui témoignent de cette nécessité du changement.